Quel enseignement en milieu pénitentiaire ?
ÉDUCATION. Par Mickaël Soigneux, principal du collège Rosa Bonheur du Châtelet-en-Brie, dans l’Académie de Créteil, ancien responsable national adjoint de l’enseignement en milieu pénitentiaire de 2018 à 2020 pour la Direction de l’administration pénitentiaire et la Dgesco.
L’enseignement en milieu pénitentiaire s’inscrit dans une perspective d’éducation permanente, de formation tout au long de la vie et de préparation à un diplôme. Le service public de l’Éducation propose aux personnes détenues une prise en charge et une offre de formation adaptées, ce qui leur permet d’acquérir connaissances et compétences. L’enseignement concourt ainsi à la réinsertion des personnes détenues. Il a également pour mission de leur faire partager les valeurs de la République. Cet enseignement s’adresse en priorité aux plus jeunes (mineurs et jeunes adultes) et aux adultes sans qualification, ni diplôme, notamment les illettrés et les non francophones.
L’activité d’études en prison s’inscrit dans un cadre législatif et organisationnel précis. La fonction de l’éducation consiste de manière très générale à préparer l’individu à son rôle social. En effet, l’éducation en prison est porteuse d’un engagement de resocialisation et incarne, par les différentes figures socio-éducatives qui y interviennent, le maintien avec l’extérieur. À noter que, dans le cadre du contexte carcéral, l’accès à l’éducation est entendu comme :
« […] un droit de l’homme et une condition préalable indispensable non seulement pour l’adaptation des hommes et des femmes aux transformations rapides de la société mais aussi pour leur permettre de profiter pleinement de leur capacité à façonner leur propre existence et à jouer un rôle […] dans le progrès social, économique et culturel »
(Éducation des adultes et développement communautaire Conseil de l’Europe, 1987, projet n°9)
Depuis 2006, le droit français intègre le cadre de référence à l’éducation et à la formation en prison, de sorte que l’accès à l’éducation pour les détenus s’organise à partir du socle commun de connaissances, de compétences et de culture (cf. article L. 122-1 et suivants du Code de l’Éducation). Le socle commun de références fixe les modalités de validation des acquis, en particulier pour la préparation et la passation de diplômes. En France, l’État a confié la mission d’enseignement dans les prisons au ministère de l’Éducation nationale. Les personnels ont la même formation et le même statut qu’à l’extérieur des murs. Ils doivent aussi suivre des directives identiques quant aux programmes.
Ainsi, s’engager dans un parcours de formation en prison revêt un caractère formel, comme le précise la section 2 du texte de la Loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire (art. 27 à 29) :
« Toute personne condamnée est tenue d’exercer au moins l’une des activités qui lui est proposée par le chef d’établissement et le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation dès lors qu’elle a pour finalité la réinsertion de l’intéressé et est adaptée à son âge, à ses capacités, à son handicap et à sa personnalité (art.27).
Sous réserve du maintien du bon ordre et de la sécurité des établissements et à titre dérogatoire, des activités peuvent être organisées de façon mixte (art. 28).
Sous réserve du maintien du bon ordre et de la sécurité de l’établissement, les personnes détenues sont consultées par l’administration pénitentiaire sur les activités qui leur sont proposées (art.29) ».
Dans un souhait d’homogénéisation de l’organisation de l’ensemble des structures à l’intérieur des prisons et suivant les préconisations européennes, une convention de partenariat entre le ministère de la Justice et le ministère de l’Éducation nationale est en place.
Cette convention précise les conditions d’accès à la formation et à l’enseignement des personnes détenues, les objectifs, missions et moyens mis à disposition, dans une perspective d’éducation permanente, de poursuite ou de reprise d’un cursus de formation et de préparation d’un diplôme. Il s’agit de doter la personne détenue des compétences nécessaires pour se réinsérer dans la vie sociale et professionnelle. Dans ce cadre, l’éducation aux personnes détenues passe essentiellement par l’enseignement. Celui-ci est intégré à chacune des étapes du parcours de la détention, depuis le repérage initial jusqu’à la préparation de la sortie, dans une perspective de validation des acquis par des diplômes et/ou par la tenue d’un livret personnel de compétences de l’éducation nationale (cf. article D. 311-6 et suivants du code de l’éducation).
En 1995, une première convention est signée entre le ministère de la Justice et le ministère de l’Éducation nationale. Les spécificités de l’enseignement en milieu pénitentiaire ont rendu nécessaire le renforcement du partenariat entre les ministères afin d’améliorer la qualité de l’enseignement dispensé aux personnes détenues. Cette convention a été renouvelée en 2003 et en 2011.
La dernière convention a été signée le 15 octobre 2019 par la Garde des sceaux, ministre de la Justice et le ministre de l’Education nationale à l’occasion de la commission nationale de suivi de l’enseignement. La nouvelle circulaire est parue le 9 mars 2020. Ces deux textes définissent de façon réglementaire le cadre du partenariat entre les deux ministères. La lutte contre l’illettrisme demeure l’une des priorités de l’enseignement en milieu pénitentiaire ainsi que la prise en charge des mineurs. Quatre priorités sont en effet soulignées dans cette convention de 2019 : la lutte contre l’illettrisme, la prise en charge des mineurs, l’employabilité et le numérique.
Des unités locales d’enseignement
Au niveau national, deux personnels d’encadrement (personnels de direction et / ou d’inspection) assurent le pilotage de l’enseignement en milieu pénitentiaire.
De plus, des personnels de direction et leurs adjoints dirigent et coordonnent l’action des unités pédagogiques régionales (UPR) dans chaque direction interrégionale des services pénitentiaires, dans les établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM) et à Fleury-Mérogis.
Il existe une unité locale de l’enseignement (ULE) dans chaque structure pénitentiaire. Un enseignant du premier ou du second degré y tient le rôle de responsable local de l’enseignement (RLE) en pilotant l’enseignement au niveau local, en lien avec la direction de l’UPR.
Durant l’année scolaire 2018-2019, l’encadrement a été assuré par 518 équivalents temps plein (ETP) enseignants titulaires du 1er ou du 2nd degré. Cette prise en charge est complétée par des heures supplémentaires effectives et l’intervention de 1 274 enseignants assurant des vacations (enseignants titulaires du premier et du second degré).
Dans les établissements pénitentiaires qui accueillent des mineurs, un conseiller d’orientation-psychologue et un coordonnateur-conseil MLDS (mission de lutte contre le décrochage scolaire) peuvent également être présents.
Pour les enseignants nouvellement nommés, trois semaines obligatoires de formation sont organisées. La première est une formation d’aide à la prise de fonction organisée par l’École nationale de l’administration pénitentiaire (ENAP) localisée à Agen. Elle permet d’acquérir une meilleure connaissance de l’administration pénitentiaire et de ses services, ainsi que celle des personnes incarcérées. La formation aborde les thématiques suivantes : le service public pénitentiaire, l’enseignement en milieu pénitentiaire et ses orientations politiques, l’histoire pénitentiaire, le parcours pénal du détenu, la sensibilisation à la lutte contre la radicalisation violente, le repérage des risques suicidaires et représentations des métiers de l’administration pénitentiaire.
Deux autres semaines sont organisées par l’Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés (INS HEA) localisé à Suresnes. Ce sont des formations à visée pédagogique. Les thématiques abordées sont les suivantes : l’histoire des sciences : remédiation et construction du temps, la gestion de conflit, la psychopathologie de l’adolescent délinquant, la dimension cognitive des apprentissages, l’épistémologie des sciences, la psychopathologie de l’adolescent en conflit avec la loi, le retour à la scolarité, le lien avec la Protection Judiciaire de la Jeunesse.
Les interventions sont assurées essentiellement par des professionnels connaissant le milieu pénitentiaire ou les pédagogies adaptées aux populations détenues. Les contenus sont organisés à partir d’une découverte du contexte institutionnel de la prison et celui de l’Administration Pénitentiaire. Les deux semaines à l’INS HEA sont davantage centrées sur le positionnement professionnel et sur des approches pédagogiques.
Le public scolarisé en milieu pénitentiaire
L’enseignement s’adresse en priorité :
– Aux mineurs incarcérés afin de construire ou de poursuivre une scolarité. Les Établissements pénitentiaires pour mineurs (E.P.M.), qui ont vu le jour en 2007, doivent répondre à cette exigence. Ils sont exclusivement réservés aux mineurs.
– Aux personnes ne sachant ni lire, ni écrire ; l’autre objectif de l’enseignement est donc de lutter contre l’illettrisme, au sens large, c’est-à-dire tous ceux qui ne maitrisent pas les compétences élémentaires en lecture du français (illettrés, analphabètes, allophones). L’illettrisme touche 15,1 % des détenus. Ainsi, les équipes pédagogiques mettent en place des systèmes de repérage en collaboration de l’administration pénitentiaire.
En décembre 2018, les mineurs représentaient 8,2 % des effectifs scolarisés. La prise en charge de ce public prioritaire pour l’Éducation nationale est conséquente puisque les mineurs ne représentent que 1,1 % de la population pénale.
Les jeunes majeurs (18-25 ans) représentent toujours une part importante – 25,3 % contre 22 % en novembre 2017 – de la population scolarisée. La prise en charge de ces publics, plus particulièrement les 18-25 ans, est un enjeu majeur des unités locales d’enseignement (ULE). En effet, il est fréquent d’observer un temps assez long de rupture avec le scolaire avec le passage à la majorité et / ou leur entrée en détention « majeurs ».
Savoirs de base et diplômes
Durant l’année 2018-2019, 37 966 personnes ont été scolarisées dans des formations portant sur l’acquisition des savoirs de bases (contre 27 652 personnes en 2017-2018) : en français langue étrangère (FLE), en alphabétisation et illettrisme et en remise à niveau et certificat de formation générale. L’investissement consacré à l’action de remédiation qui suit le repérage du public prioritaire est donc conséquent de la part des équipes pédagogiques.
Au cours de l’année scolaire 2018-2019, 7 305 personnes détenues scolarisées ont été inscrites à des examens de l’Éducation nationale ; 4 553 s’y sont présentées et 3 325 ont obtenu un diplôme. Le taux de réussite est de 73,1 %, contre 74,9 % en 2017-2018.
Les diplômes attestant de compétences linguistiques (DILF et DELF) sont également largement plébiscités. 2 978 personnes détenues s’y sont présentées en 2018-2019, contre 2 778 en 2017-2018. 2 712 ont obtenu un diplôme, contre 2 533 en 2017-2018. Le taux de réussite s’élève ainsi à 91,1 %.
Le DILF (Diplôme initial de langue française) est un diplôme de français langue étrangère évaluant les premiers apprentissages (niveau A1.1 du cadre européen commun de référence pour les langues du Conseil de l’Europe). Il constitue une première étape vers le DELF (Diplôme d’études en langue française). Il évalue les contenus communicatifs et linguistiques décrits dans le référentiel pour les premiers acquis en français. Le DILF évalue les quatre compétences langagières : réception orale, réception écrite, production orale, production écrite. La certification DILF tient compte du Cadre européen commun de référence pour les langues ; du Référentiel pour les premiers acquis en français et des normes internationales de conception d’épreuves. Le DILF est placé sous l’autorité de la Commission nationale du DILF dont le siège est au CIEP.
Le DELF (Diplôme d’Etudes en Langue Française) est un diplôme officiel délivré par le Ministère français de l’Education Nationale qui permet de certifier les compétences en français des candidats étrangers et des Français originaires d’un pays non francophone et non titulaires d’un diplôme de l’enseignement secondaire ou supérieur public français. Le DELF se compose de 4 diplômes indépendants, correspondant aux quatre niveaux du Cadre européen de référence pour les langues, A1 – A2 – B1 – B2. Pour chaque niveau, quatre compétences sont évaluées : compréhension orale et production orale, compréhension des écrits et production écrite.
La lutte contre l’illettrisme
L’illettrisme et la non maîtrise du français et des savoirs de base sont des causes importantes d’exclusion dans notre société. Ils constituent des obstacles essentiels à la réinsertion sociale et professionnelle des personnes détenues concernées. La lutte contre l’illettrisme et les actions en faveur de la maîtrise de la langue française et des savoirs de base constituent une priorité pour l’administration pénitentiaire dans sa politique de réinsertion et pour le ministère de l’Éducation nationale en vue de proposer une école inclusive, pour la réussite de tous.
Avant de remédier aux difficultés du public prioritaire, à savoir les illettrés, les non francophones et ceux ne maîtrisant pas les savoirs de base, il faut d’abord le repérer. C’est particulièrement le cas pour les illettrés, public souvent « invisible » comme le rappelle l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI).
L’administration pénitentiaire participe à la lutte contre l’illettrisme en développant sa propre politique d’action et en s’impliquant dans une démarche interministérielle. La Direction de l’administration pénitentiaire s’est engagée aux côtés de l’Agence de lutte contre l’illettrisme (ANLCI) dès sa création pour l’appuyer financièrement et soutenir ses actions. La politique développée par l’administration pénitentiaire consiste depuis longtemps à agir directement dans la prise en charge des personnes détenues les plus en difficulté vis-à-vis de l’écrit.
Depuis 1959, il est fait mention de la prise en compte de l’illettrisme en établissement pénitentiaire puisque l’article D.452 du Code de procédure pénale précise que «L’enseignement primaire est assuré dans tous les établissements pénitentiaires» et « Les condamnés qui ne savent pas lire, écrire ou calculer couramment doivent bénéficier de cet enseignement ».
En 1988, une première enquête exploratoire a été conduite dans cinq prisons et suivie, en 1991, d’une enquête auprès de 10 625 personnes détenues. Cette dernière a donné lieu à la publication du rapport intitulé « Lutte contre l’illettrisme en milieu pénitentiaire ». Ces deux enquêtes montrent l’existence d’une proportion plus forte d’illettrés en milieu carcéral qu’en milieu libre et soulignent le phénomène d’invisibilité de l’illettrisme, et la nécessité d’une politique spécifique fondée sur un repérage systématique. Cet engagement s’est concrétisé par la mise en place dès 1994 d’un dispositif de repérage des personnes illettrées par les enseignants de l’éducation nationale intervenant en établissement pénitentiaire.
L’article 27 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, qui traite de l’obligation d’activité pour les personnes détenues condamnées, préconise une priorité de formation pour les personnes non francophones et illettrées. Il est donc nécessaire d’identifier systématiquement les publics concernés grâce au pré-repérage effectué par les personnels pénitentiaires et au repérage réalisé par les enseignants pour ensuite mettre en place une offre de formation pertinente dans chaque établissement.
L’objectif, formulé dès 2009 et poursuivi en 2010, est donc de consolider le fonctionnement actuel du pré repérage de l’illettrisme en veillant à ce que les personnes signalées en difficulté à l’oral et/ou en lecture par le personnel pénitentiaire soient ensuite reçues par les enseignants pour un bilan approfondi débouchant sur une offre de formation. L’administration pénitentiaire s’est fortement impliquée dans cette action en accordant des moyens en personnel. Depuis 2009, 46 postes d’assistants de formation ont été créés pour aider à la mise en place de ce nouveau dispositif dans les maisons d’arrêt les plus importantes.
Le test de compétences élémentaires en lecture du français
L’administration pénitentiaire, dans le cadre de sa mission de réinsertion, a, depuis 1995, considéré la lutte contre l’illettrisme comme une priorité et mis en place un dispositif dénommé Pré-repérage de l’Illettrisme – Repérage de l’Illettrisme (PRI-RI) et un test dénommé Lecture population pénale (LPP). Depuis 2008, un plan de lutte contre l’illettrisme a été conçu pour répondre aux orientations fixées par l’article 27 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 fixant une priorité de formation pour les personnes détenues non francophones ou illettrées. Il répond également aux objectifs inscrits dans le code de procédure pénale (art. 436) et au cadre de la mise en œuvre des règles pénitentiaires européennes (RPE) qui ont conduit à la labélisation des quartiers arrivants dans l’ensemble des établissements pénitentiaires.
Le test de lecture et population pénitentiaire (LPP) qui datait de 1995 et le dispositif actuel Pré-Repérage de l’Illettrisme- Repérage de l’Illettrisme (PRI-RI) ont fait l’objet d’une analyse qui a abouti à la mise en place d’un nouvel outil – le test de Compétences Élémentaires en Lecture du Français (CELF) – qui s’intègre dans un nouveau dispositif dénommé – Repérage-positionnement des niveaux de français (R-PNF). Ce nouveau test a été élaboré par des enseignants chercheurs de l’institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés (INSHEA).
Ce nouveau test est un outil simple et fiable répondant aux critères de repérage de l’illettrisme tels que définis par l’agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI), l’objectif étant d’une part d’aider les personnels de l’administration pénitentiaire à mieux remplir la mission de repérage (dénommé actuellement d’une façon inadaptée pré-repérage) et permettre aux enseignants de rendre plus efficace la prise en charge et cela sans créer une nouvelle charge pour les personnels de l’administration pénitentiaire.
La mise en œuvre de ce nouveau dispositif et nouveau test repose sur une collaboration étroite entre les services de l’administration pénitentiaire et les services de l’enseignement en milieu pénitentiaire que ce soit au niveau interrégional (pilotage, formation des référents et information des services et des partenaires) qu’au niveau de l’établissement (mise en place du dispositif, formation des agents et contrôle de la qualité du repérage). Dans chaque direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP), des enseignants, référents nationaux, formés au niveau national, sont en mesure, aux côté des formateurs de l’administration pénitentiaire, d’assurer la formation des acteurs et d’accompagner la mise en place du dispositif dans chaque quartier arrivant et d’évaluation.
Le dispositif de repérage et de positionnement des niveaux de français (R-PNF) se conduit en deux temps.
- Une première étape réalisée au quartier arrivant (R-Repérage) par un personnel de l’administration pénitentiaire qui permet d’établir les compétences à l’oral de la personne détenue et de repérer la maitrise des compétences élémentaires en langue française. Suite à ce repérage, l’enseignant jugera de l’utilité de poursuivre le test afin de déterminer la prise en charge pédagogique nécessaire.
- Une deuxième étape réalisée par le service d’enseignement (PNF-Positionnement des Niveaux de Français) permet de positionner la personne détenue afin de remédier au plus vite et le plus efficacement possible aux difficultés sous forme de modules de remédiation dont la durée est adaptée au besoin mais également à la durée de la détention.
Animation culturelle et insertion
Les enseignants de l’Éducation nationale prennent en charge pédagogiquement des personnes illettrées dans les cours. Il faut noter que 35% des cours relèvent d’actions de lutte contre l’illettrisme. Ces actions et leur évaluation montrent le haut niveau d’implication des services auprès des plus en difficulté. Cette prise en charge est fondamentale et demande de mettre en place des méthodes pédagogiques adaptées. Cela explique le recrutement important d’enseignants – professeurs des écoles spécialisés.
D’autres actions sont mises en place dans le cadre de l’animation culturelle relevant des services d’insertion et probation de l’administration pénitentiaire. Les activités culturelles présentent l’intérêt de contribuer au développement de la capacité à communiquer en utilisant des voies d’apprentissage non formelles, mais complémentaires de celles mises en œuvre durant les sessions de formation ou d’enseignement classiques en prison. Les personnes détenues en très grande difficulté avec les savoirs de base, dont les personnes illettrées, trouvent ainsi l’occasion à partir d’un projet culturel d’accéder, parfois pour la première fois, à une nouvelle dimension du savoir qui enrichit leur projet de formation.
La Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) organise depuis environ 20 ans « La semaine de la langue française » en mars, dispositif fêté aussi à l’étranger pendant lequel la langue française est valorisée dans toute sa richesse et sa diversité. Placée sous l’’autorité de la ministre chargée de la culture, la délégation générale à la langue française et aux langues de France oriente et coordonne les politiques publiques visant à garantir l’emploi de la langue française, à promouvoir son usage et à assurer son enrichissement. Elle leur apporte son expertise et s’assure de leur mise en œuvre. Des événements sont organisés à cette occasion : dictées, conférences, spectacles, joutes oratoires ou toutes autres manifestations originales. Ce temps fort est également l’occasion de valoriser les multiples projets réalisés dans le cadre du concours national « Dis-moi dix mots » lancé par la DGLFLF.
Ce concours national, relayé par l’Éducation nationale, est largement investi par les enseignants en milieu pénitentiaire qui le mettent en œuvre auprès des publics détenus. Ainsi, depuis 2010, des personnes détenues de l’établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) de Marseille, de la maison d’arrêt de Metz, de la maison d’arrêt de Strasbourg et de la maison d’arrêt de Rochefort ont été lauréats et ont reçu un prix à l’Académie française lors de permissions de sortir.
La langue étant transversale à l’activité humaine, la capacité à s’exprimer à l’oral et à l’écrit dans les différentes situations de la vie sociale constitue ce que l’on entend communément par maîtrise de la langue. L’expression individuelle, et en conséquence la réussite scolaire, l’insertion sociale, le devenir professionnel, l’accès aux œuvres de l’esprit, mais aussi l’exercice de la citoyenneté, sont liés étroitement à la maîtrise de la langue. Si notre cadre constitutionnel et légal en vertu duquel « La langue de la République est le français » illustre le rôle clé de notre langue dans le sentiment d’appartenance à la République, les fortes inégalités dans la pratique et la maîtrise du français constituent un obstacle de taille à l’adhésion à ce modèle.