Les Suppliques : lettres sans réponse
Le documentariste Jérôme Prieur s’appuie sur les travaux de Laurent Joly pour réaliser Les Suppliques. Un film tout en rigueur et en émotion sur ces lettres envoyées, en vain, par des Juifs au maréchal Pétain en 1941, pour qu’il intercède en faveur d’un parent ou d’une connaissance arrêté ou empêché de travailler. Diffusé le lundi 11 juillet à 22h55 sur France 3.
Par Norbert Czarny, critique
Le documentariste Jérôme Prieur s’appuie sur les travaux de Laurent Joly pour réaliser Les Suppliques. Un film tout en rigueur et en émotion sur ces lettres envoyées, en vain, par des Juifs au maréchal Pétain en 1941, pour qu’il intercède en faveur d’un parent ou d’une connaissance arrêté ou empêché de travailler. Diffusé le lundi 11 juillet à 22h55 sur France 3.
Par Norbert Czarny, critique
À partir du printemps 1941, les mesures antisémites prises à la fois par les nazis et par le régime de Vichy vont en s’accentuant, rendant de plus en plus difficile la vie quotidienne des Juifs étrangers, mais aussi français. Entre l’inscription dans les fichiers qui permettra à la police d’organiser les rafles de 1942, les interdictions diverses, de la possession d’une bicyclette au droit d’entrer dans un jardin public ou une salle de cinéma, être né de religion juive devient une sorte d’infraction.
On appelle « suppliques » les lettres que des particuliers envoient alors au maréchal Pétain pour qu’il intercède, vienne en aide à celui ou celle dont un parent a été pris dans une rafle, au professionnel, qu’il soit un grand chirurgien ayant combattu pendant la Première Guerre mondiale, ou une marchande des quatre saisons, au commerçant dont la boutique a été mise sous séquestre. La réponse est laconique, émise par le Commissariat général aux questions juives : pas possible.
Jérôme Prieur, auteur de nombreux documentaires dont Hélène Berr, une jeune fille dans Paris occupé, Vivre dans l’Allemagne de Hitler ou Vivre dans l’Allemagne en guerre, propose avec Les Suppliques une œuvre qui allie la rigueur, l’intelligence et l’émotion. Le film prend appui sur les travaux de Laurent Joly qui font autorité et complètent les recherches de Serge Klarsfeld.
Pas de commentaire en surplomb, qui dirait cette sinistre période achevée. Elle se raconte au présent de l’archive. L’auteur évite tout effet spectaculaire. Des lettres apparaissent à l’écran en même temps qu’une voix off les fait entendre. Le spectateur voit des objets, des photos, notamment celle d’André Zucca sur le Paris de l’Occupation. Chaque lettre met en lumière une existence, une vie perdue, et notamment celle des enfants. En contrepoint, des images de propagande montrent le maréchal recevant des lettres d’écoliers, de petits cadeaux et dessins. Tous les enfants ne sont pas logés à la même enseigne.
Ce documentaire, utilisé dans des classes de troisième ou de lycée, peut être un excellent support pour donner une compréhension intime de ce que fut la persécution.
Les professeurs d’histoire ou de lettres pourront l’enregistrer ; le replay sera précieux, mais hélas de courte durée.
N. C.